Plan de l'article
La mort frappe-t-elle vraiment au hasard ?
1. Des premières saisons douloureuses
2. Petit point méthodologique (désolé...)
3. Première entorse à la croyance : Jon Snow ne pouvait pas mourir
4. Les grandes victimes : les personnages auxquels on s’attache
5. Les anonymes : que faire de Gérald ?
La mort frappe-t-elle vraiment au hasard ?
Selon N. Camart et R. ZebdiCesbron, M. (2016). « Pourquoi Game of Thrones est un cas clinique ». In : Le Point Pop. [En ligne] : http://www.lepoint.fr/pop-culture/series/pourquoi-game-of-thrones-est-un-cas-clinique-17-05-2016-2039830_2957.php [Consulté le 6 avril 2018], la mort est aléatoire dans Game of Thrones et « aucun personnage n’est à l’abri ». De nombreux articles de presseSource : voir la section « Pour aller plus loin ». reprennent cette idée : cela nous maintient en haleine et est la cause de l’addiction à la série. Pourquoi ? Parce que nous vivons dans une société où les inégalités face à la mort sont importantes. En France, un homme cadre de 35 ans peut espérer vivre 6 ans de plus qu’un homme ouvrier [Source : INSEE].
Mais n’y a-t-il vraiment aucune logique à la mort dans Game of Thrones ? Jon Snow
proba décès :
2%, idole des téléspectateurs (et pas seulement des téléspectatrices) présent dans 56 des 67 épisodes, a-t-il le même risque de mourir que l’écuyer Gérald
proba décès :
38% faisant une fugace apparition avant de partir en guerre ?
Les morts violentes et inattendues de certains personnages populaires ont choqué de nombreux spectateurs : rappelons-nous de Ned Stark
proba décès :
100%, de Drogo
proba décès :
98%, de Catelyn Stark
proba décès :
91% ou encore de Robb Stark
proba décès :
99%. Combien de cris déchirants poussés et de larmes versées (une vidéo en compile les réactions ici !) ?
Ainsi on remarque bien que les personnages décèdent alors même qu'ils devenaient importants (on remarque toutefois que ce n'est pas parce qu'un personnage devient intéressant qu'il meurt : en effet Jaime Lannister
proba décès :
1% ou Theon Greyjoy
proba décès :
18% connaissent des pics d'intérêt pendant la saison 3 et ne décèdent pas pour autant) - Fig. 2 et Fig. 3.
Mais faut-il se limiter à cela ? Aujourd’hui ces morts commencent à dater. Le spectateur doit-il toujours se méfier ? À l’issu des sept premières saisons, peut-on toujours affirmer qu’aucun personnage n’est à l’abri ?
Pour répondre à cette question, nous recourons aux régressions logistiques (si vous êtes masos et que vous voulez comprendre les tenants et les aboutissants de cette méthode, reportez-vous à la méthodologie). En gros, ce modèle « optimal » (Fig. 4) estime au mieux le lien entre les caractéristiques d’un personnage et son risque de mourir toutes choses égales par ailleurs. Nous pouvons déterminer quelles caractéristiques rendent la mort plus fréquente et quelles autres protègent de la mort.
Ce modèle nous permet de calculer le risque de mourir des personnages (c’est celui qui apparaît quand vous passez la souris sur un nom de personnage !). À partir de ces risques calculés par le modèle nous dressons les portraits (Fig. 6) des grands survivants et des grandes victimes (les 20 personnages ayant respectivement les plus forts et les plus faibles risques de mourir).
Félicitation ! Vous avez survécu. À moins que... Vous êtes toujours là ?
Un autre point de vue : la mythologie du héros par Lter Brac
Au cours d'une discussion très riche, Lter Brac nous a fait part de son analyse radicalement différente. Pour lui, Jon Snow devait mourir :
Les vingt personnages aux meilleures chances de survieSi vous souhaitez connaître la liste de ces vingts personnages, nous vous conseillons de cliquez ont entre 0,08% et 5,27% de « chance » de mourir. Ces personnages sont capitaux pour l'intrigue :
Des statistiques impressionnantes vous en conviendrez.
Par rapport à un personnage apparaissant dans 3 ou 4 épisodes, un personnage présent dans plus de 30 épisodes a 250 fois moins de risque de mourir (toutes choses égales par ailleurs).
Ces personnages sont tellement importants que les scénaristes peinent à les tuer. Lorsqu’ils osent : miracle ! Ils reviennent à la vie. Comme Jon Snow (Fig. 5) ! Si vous n’étiez pas au courant, ce n’est pas un spoilOu comme on le dirait au Québec, un divulgâchis !Le fun fact du démographe (accrochez-vous) : d’après le modèle, les personnages apparaissant au cours des trois premiers épisodes de la saison 1 ont une probabilité plus élevée de décéder. Pourtant, il s’agit de personnages centraux. Pour vous en assurer, voici quelques noms : Jaime
proba décès :
1%, Tyrion Lannister
proba décès :
1%, Cersei
proba décès :
11%, Sansa
proba décès :
12%, Jon, Théon
proba décès :
18% (certes, il y a aussi Ned,
proba décès :
100% Catelyn
proba décès :
91% et Robb
proba décès :
99%, mais quand même !)... Comment est-ce possible ? Tout simplement parce que pour survivre aux sept premières saisons, ces personnages centraux doivent traverser sans embûches l’intégralité des épisodes. Les démographes que nous sommes diraient qu’ils sont donc soumis plus longtemps au risque de mourir. Quoi de plus normal donc à ce qu’ils décèdent plus en dépit de leur importance ?
Dans le dossier intitulé « cohorte »Cliquez ici accéder aux dossiers universitaires, nous tentons d’annihiler ce temps de soumission au risque pour rendre comparable la mortalité des cohortes. Si vous êtes motivés, allez jeter un œil !
À l'opposé des grands survivants, les vingt personnages aux moins bonnes chances de survie ont en moyenne 99,2% de risque de mourir (Fig. 6)
Ces personnages sont importants pour l’intrigue et les spectateurs : leur popularité est 3 fois plus importante que celle des autres personnages et lorsqu’ils apparaissent dans un épisode, ils sont à l’écran durant 3 minutes et 40 secondes, un record !
Toutefois, s’ils apparaissent dans plus d’épisodes que la moyenne (3 grandes victimes sur 4 apparaissent entre 5 et 20 épisodes contre moins de 3 en moyenne), les grands survivants les battent à plates coutures en apparaissant beaucoup plus.
Notre hypothèse ? Les scénaristes de Game of Thrones tuent des personnages récurrents qui ne dépassent pas un certain nombre d'épisodes d'apparition (et par extension une certaine popularité). Pour ne pas tuer les personnages centraux, on tue ceux auxquels on s’attache et qui ont une importance temporaire pour l’intrigue. Un grand classique.
Nous vous avons déjà parlé de Gérald (Fig. 7). Et pour cause, c’est notre chouchou. Il est aux séries ce que « Charlie » est à la BD : la discrétion faite homme. Romane et son copain ont passé de longues minutes à le chercher dans l’épisode où il apparaît.
À l’instar de Gérald, de nombreux personnages n'apparaissent que quelques secondes au cours d'un unique épisode. Nous n’en avons étudié qu’un nombre restreint (130 tout de même !) car la plupart n’ont pas de nom. Quels risques de décéder connaissent ces personnages dont tout le monde a oublié le nom et dont très peu l'ont ne serait-ce que connu ? Ces personnages ont un risque de décéder plus faible que la moyenne (38% contre 51% pour l'ensemble de nos personnages). Contrairement à ce que l’on pourrait croire, il ne semble donc pas s’agir de la chair à canon de Game of Thrones. La plupart de ces personnages se contente de disparaître à jamais sans laisser de trace. À jamais ? Personne ne le sait ! On peut espérer un come-back de Gérald pour bouter les Marcheurs Blancs lors de l’ultime saison ! On ne parierait pas la dessus tout le même...
Outre des preuves de l’importance des personnages, le modèle « optimal » conserve la noblesse, la taille de l’allégeance, le statut de combattant et le nombre de victime(s). C’est donc qu’il y a des caractéristiques qui influencent le risque de décéder ! Voici les logiques qui ressortent d’ores et déjà :
Mais il y a pleins d’autres leçons à en tirer. On vous renvoie vers nos autres articles : cliquez ici si vous voulez savoir ce qu’il en est des femmes dans Game of Thrones, et ici si l’impact du corps vous intéresse.
En conclusion, si aucun personnage de Game of Thrones n'est totalement à l'abri de la mort (le risque de décéder ne peut pas être nul) certains le sont quand même plus que d'autres. Si vous voulez voir le détail de ces risques calculés par notre modèle, cliquez ici.
Cesbron, M. (2016). « Pourquoi Game of Thrones est un cas clinique ». In : Le Point Pop. [En ligne] : http://www.lepoint.fr/pop-culture/series/pourquoi-game-of-thrones-est-un-cas-clinique-17-05-2016-2039830_2957.php [Consulté le 6 avril 2018]
Chapon, B. (2014). « Comment « Game of Thrones » est devenu le phénomène pop des années 2010 ». In : 20 minutes. [En ligne] https://www.20minutes.fr/television/1342261-20140403-comment-game-of-thrones-devenu-phenomene-pop-annees-2010 [Consulté le 11 avril 2018]
Langlais, P. (2017). « “Game of Thrones”, le succès en dix leçons ». In : Télérama. [En ligne] : http://www.telerama.fr/series-tv/game-of-thrones-le-succes-en-dix-lecons,160044.php [Consulté le 6 avril 2018]
Marzolf, H. et Mury, C. (2010). « “Game of thrones”, la série souveraine ». In : Télérama. [En ligne] http://www.telerama.fr/television/game-of-thrones-serie-souveraine,102962.php [Consulté le 11 mai 2018]
Beaufort, R. et Melissent, L. (2018). « Probabilités de décès par personnage ? ». In : When demographers play the Game of Thrones. [En ligne] : proba_pop.html [Consulté le 18 novembre 2018]
Bricard, M. (2017). « "Game of Thrones" : qui va mourir dans les prochains épisodes ? ». In : RTL. [En ligne] : http://www.rtl.fr/culture/super/game-of-thrones-qui-va-mourir-dans-les-prochains-episodes-7789597838 [Consulté le 6 avril 2018]
Martin, C. (2017). « “Game of Thrones” : qui va mourir dans la saison 7 ? ». In : Première. [En ligne] : http://www.premiere.fr/Series/News-Series/Game-of-Thrones-qui-va-mourir-dans-la-saison-7 [Consulté le 6 avril 2018]
Munier, R. (2017). « “Game of Thrones” : l'algorithme qui veut prédire les prochains morts ». In : Usbek & Rica . [En ligne] : https://usbeketrica.com/article/l-algorithme-qui-veut-predire-les-morts-de-game-of-thrones [Consulté le 6 avril 2018]
(2017). « Qui va mourir dans la saison 8 de “Game of Thrones” ? ». In : Topito. [En ligne] : http://www.topito.com/battle/qui-va-mourir-dans-la-saison-8-de-game-of-thrones [Consulté le 6 avril 2018]
Beaufort, R. et Melissent, L. (2018). « Un monde violent ». In : When demographers play the Game of Thrones. [En ligne] : https://www.demographie-got.com/un_monde_violent.html [Consulté le 18 novembre 2018]
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Beaufort, R. et Melissent, L. (2018). « Calendriers des décès ». In : When demographers play the Game of Thrones. [En ligne] : https://www.demographie-got.com/cal_deces.html [Consulté le 18 novembre 2018]
Beaufort, R. et Melissent, L. (2018). « Carte des décès ». In : When demographers play the Game of Thrones. [En ligne] : https://www.demographie-got.com/carte.html [Consulté le 18 novembre 2018]